Clauses d’insertion et clauses environnementales

Pourquoi avoir une approche conjointe ?

Article AMOILes articles 30 et 38 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 régissant les marchés publics, imposent au pouvoir adjudicateur de prendre en compte préalablement au lancement de leurs consultations « des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale », et la possibilité d’inclure celles-ci dans les conditions d’exécution du marché.

La prise en compte de considérations sociales prend très souvent la forme de clauses dites d’insertion. Il s’agit de destiner dans le marché, une partie de la prestation à des publics loin de l’emploi (sans qualification, victimes de discrimination, rencontrant des difficultés sociales etc.), ceci notamment sous la forme d’un nombre d’heures de travail à réaliser.

Les thématiques environnementales quant à elles sont très larges. On retrouve la limitation de la consommation d’eau et d’énergie, la gestion responsable des déchets, l’achat de produits éco-labélisés ou encore la protection de la biodiversité. La liste n’est pas exhaustive.

Jusqu’à présent, l’insertion et l’environnement, étaient traitées séparément par les entreprises et les collectivités. Les raisons sont multiples : les deux thématiques sont rarement développées en même temps dans une même structure ; on retrouve peu de référents internes compétents à la fois sur l’insertion et sur l’environnement ; il y a peu d’expériences réussies pouvant servir de modèle pour qu’une structure novice expérimente.

A ces raisons organisationnelles, on peut ajouter le fait que l’environnement est un sujet transverse qui peut toucher toutes les étapes d’un projet, de la conception à la réalisation. Par conséquent il n’est pour l’instant pas possible de trouver une structure d’insertion par l’activité économique (SIAE) en mesure d’offrir toutes ces prestations. Découle de ce constat, un préjugé consistant à dire que l’insertion sociale ne relèverait que de travaux « sans qualification ».

S’il est vrai qu’on ne trouve pas de SIAE dans tous les secteurs d’activité, un bon nombre d’entre elles sont d’ores et déjà compétentes sur plusieurs sujets liés spécifiquement à l’environnement. Que ce soit la gestion et le recyclage des déchets, l’entretien des espaces verts, les prestations de nettoyage écologiques ou la production d’une agriculture biologique.

Fusionner insertion et environnement dans un marché réservé ou dans un lot du marché présente de nombreux avantages pour le Donneur d’Ordre :

  • Premièrement, l’insertion sociale et l’environnement s’inscrivent tous deux dans une approche commune de responsabilisation de l’action collective. Il paraît donc logique d’associer ces deux dimensions sous couvert d’une politique de développement durable, RSE ou achats responsables.
  • Deuxièmement, mobiliser les heures en insertion spécifiquement sur les prestations liées à l’environnement, permet de gagner en efficacité. Le Donneur d’Ordre n’aura plus qu’à solliciter un seul interlocuteur pour prendre en charge ces deux volets. En d’autres termes, il s’agit de faire d’une pierre deux coups.
  • Troisièmement, cette manoeuvre garantit que le marché concerné aura un impact local positif. L’environnement est par définition une donnée territoriale tout comme l’insertion qui est censée profiter aux demandeurs d’emploi du territoire.

Le seul bémol est que lorsque que l’on confie l’insertion et l’environnement exclusivement à un lot du marché, les entreprises des autres lots n’ont plus l’opportunité d’intégrer dans leurs équipes des personnes en insertion. Elles sont aussi moins responsabilisées à la question environnementale. Dans cette configuration, il conviendra alors de trouver d’autres alternatives pour diffuser des pratiques sociales et écologiques auprès de ces entreprises. Hormis ce bémol, ce que nous appelons l’Insertion par l’Activité Environnementale mérite de se développer.

Comment adopter cette approche ?

Article AMOI 4Pour relever ce défi, il faudrait d’une part, que les Donneurs d’Ordre s’appuient sur des facilitateurs locaux, des cabinets de conseil ou des Assistants à Maîtrise d’Ouvrage (AMO) ayant une double casquette (sociale et environnement) et d’autre part, il faudrait que les SIAE spécialisées dans les activités environnementales continuent de se développer et d’être beaucoup plus visibles.

Grâce à ces deux leviers on devrait voir éclor plus de prestations d’insertion par l’environnement. Ci-dessous quelques exemples de structures allant dans ce sens :

Gestion et recyclage des déchets 

Le Réseau Envie fédère des associations et des entreprises d’insertion pour l’activité de logistique, de rénovation, de recyclage et de traitement des déchets électriques et électroniques (D3E).

  •  Gestion des espaces verts 

Dans le cadre de chantiers d’insertion, l’association Espaces est responsable de la gestion écologique des espaces naturels de l’Ouest parisien.

  •  Nettoyage et propreté

NetEcologic est une entreprise de nettoyage qui recours à des méthodes et des produits d’entretien strictement écologiques tout en favorisant l’emploi de personnes en insertion.

  •  Agriculture biologique 

Regroupés sous forme de réseau, les Jardins de Cocagne sont des exploitations maraîchères se basant sur le cahier des charges de l’agriculture biologique et à vocation d’insertion sociale et professionnelle.

Mais avant d’arriver à répandre ces pratiques, encourageons les Maîtres d’Ouvrage à prendre l’habitude d’inclure systématiquement dans leurs marchés des considérations sociales et environnementales dans l’exécution de leur projet même si les deux thématiques sont traitées séparément.

Comment propager cette approche ?

A titre d’exemple, nous pouvons citer notre action auprès du bailleur social Logis Transports filiale de la RATP dans le cadre d’une opération de résidentialisation de près de 21 hectares. Cette opération comporte un volume conséquent de réfection des Voiries et Réseaux Divers ainsi que des travaux divers de maçonnerie et d’aménagement d’espaces verts. Tout ceci est producteur d’importantes quantités de déchets en tout genre (inertes, non-dangereux, dangereux, D3E etc.).
Article AMOI 3Il nous est donc paru déterminant d’apporter une attention particulière à la gestion des déchets. D’autant plus que comme pour la plupart des thématiques environnementales, la responsabilité revient principalement au Maître d’Ouvrage, censé veiller à la limitation des impacts induit par son activité. A cela, il faut ajouter que le tri sur le chantier permet de faciliter la traçabilité des déchets, de réduire les coûts d’élimination, d’optimiser la valorisation des déchets et de sensibiliser les salariés.

En plus de ceci, le Donneur d’Ordre a sollicité notre expertise pour introduire de l’insertion dans son chantier à hauteur de 10 % des heures de travaux. Ces heures d’insertion sont ventilées entre les différents lots. Les entreprises de travaux ont aussi la possibilité de recourir à des SIAE pour la valorisation de leurs déchets.

Voici donc un marché comportant à la fois des clauses sociales et des clauses environnementales, le tout conduit par un seul professionnel, faisant office d’AMO insertion et environnement.

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